Nous vivons dans une société de l’instantanéité.
On n’accepte plus de faire la queue pour payer.
On râle quand le réseau internet est lent.
On attend une réponse immédiate quand on vient d’envoyer un mail.
Conclusion : on vit sous pression de l’urgence continue.
Et c’est très fatigant.
Mais pourquoi accepte-t-on donc cette tyrannie de l’urgence ?
Le culte de l’urgence
👉 L’urgence, c’est hyper stimulant : répondre à une urgence déclenche une dose d’adrénaline qui rend la vie intéressante. Le temps passe vite, on se sent en mouvement : l’urgence est une forme de drogue.
👉 On aime la gratification immédiate de l’urgence : quand on travaille dans l’urgence, on produit rapidement, on voit donc rapidement les résultats de ce qu’on a fait et on a plus rapidement des retours d’autres personnes.
👉 Être un homme ou une femme pressé.e est valorisé socialement : en France, peut-être plus que dans d’autres pays, il est valorisé de travailler beaucoup. Quand on voit quelqu’un sous l’eau, on ne se dit pas qu’il est mal organisé mais plutôt qu’il doit avoir de grandes responsabilités.
👉 Peur de perdre des opportunités : avec l’accélération des modes de communication, les attentes en matière de réponses immédiates sont devenues la norme. On a peur, en ne répondant pas assez vite, en ne se formant pas assez vite, en ne produisant pas assez vite, de passer à côté de quelque chose d’important. Un appel téléphonique ? on répond. Une notification sur notre téléphone ? On ouvre l’application pour voir ce qui est dit…
👉 On a peur du retard : on donne aux autres des délais très courts pour être sûrs que s’ils dépassent ces délais on ne sera pas nous-mêmes en retard. Ce qui contraint tout le monde.
Quand l’urgence devient un cycle infernal
En fait, à force que tout soit urgent,
👉 on ne voit plus les vraies urgences
👉 on ne sait plus profiter de la vie – certaines personnes n’osent plus prendre du temps pour elles de peur du regard des autres
👉 on décale des tâches importantes qui deviennent un jour, à leur tour urgentes – voire on ne les fait jamais
👉 on valorise l’action sur la réflexion et le court-terme sur le long-terme, ce qui peut avoir des répercussions négatives sur notre vie
L’urgence alimente le stress, tend les relations entre les gens et n’aide pas à prendre de bonnes décisions : on décide rarement bien sous urgence.
Et puis, lorsqu’on fonctionne sous urgence, il n’y a plus de place pour des choses importantes non urgentes comme prendre soin de sa santé, faire du sport, voir des amis, prendre du plaisir à se balader…
Et le pire, c’est qu’on finit aussi par ne plus savoir vivre autrement que sous urgence : la vie devient fade quand elle est vécue au ralenti…
C’est exactement ce que je viens de réaliser pour moi.
Il y a quelques mois, je me suis rendue compte que j’avais de plus en plus de mal à me concentrer sur une seule chose à la fois. Je n’arrive plus, par exemple à écouter un podcast sans ouvrir mon téléphone portable ou mes mails par exemple. Evidemment, je ne fais rien de bien : je n’écoute le podcast que d’une oreille distraite et je traite mal mes mails…
J’ai aussi plus de mal à stopper le boulot le week-end pour me mettre à des activités que j’adore comme le jardinage, le dessin ou la peinture.
En y réfléchissant, j’ai découvert pourquoi : quand je me mes à mon ordinateur, je vois le résultat assez vite. C’est très gratifiant. A l’inverse, si je me mets au jardinage ou à la peinture, cela nécessite de sortir des outils, prendre du temps pour produire et je ne vois pas le résultat immédiatement.
En fait, l’urgence est une véritable drogue qui, si on ne s’en rend pas compte, devient une forme de mode de vie : on ne sait plus ne rien faire. On doit toujours faire quelque chose, et, de préférence, vite pour pouvoir en faire encore plus.
La boulimie de l’action.
Et c’est fatigant. J’aimerais bien ralentir.
Pour cela, il faut que je me désintoxique de ce goût pour l’urgence.
L’urgence véritable ou l’urgence injustifiée
« Il n’est pas de problème dont une absence de solution ne finisse par venir à bout. »
Henri Queuille
En fait, il n’y a que très peu de choses qui soient vraiment urgentes.
Alors comment faire pour réduire les urgences :
- D’abord identifier mes vraies priorités : ce n’est qu’en faisant ce travail que je saurais distinguer ce qui est véritablement une urgence de ce qui n’en est pas une.
- Ensuite, quand je me retrouve en face d’une urgence, essayer de comprendre pourquoi c’est une urgence : est-ce parce que c’est un dossier qui n’a pas été traité en temps voulu et qui est maintenant devenu une urgence ? Est-ce parce que j’ai envie d’adrénaline et c’est moi qui me crée une urgence ? L’idée, c’est de trouver des remèdes pour que çà n’en soit plus. Car je suis vraiment convaincue qu’on peut limiter au strict minimum les urgences.
A force d’y réfléchir, voilà les outils que j’ai adoptés pour essayer de sortir de cette notion d’urgence.
Les moyens que j’utilise pour sortir de l’urgence
J’ai adopté certains réflexes
👉 Quand on me demande quelque chose, je demande pour quand la personne en a besoin. Je suis souvent surprise que les autres en ont besoin dans un délai relativement plus long que celui que je me donne.
👉 Quand je me donne une tâche à faire à moi-même, j’essaie de questionner la notion d’urgence et la gravité si je ne la fais pas ou pas à la bonne date – Bon, ca ne marche pas toujours, car quand ce sont des tâches que je me donne à moi-même, en général j’ai très envie qu’elles soient faites rapidement 🤪
👉 Quand on me dit « c’est urgent« , cela allume dans ma tête une petite lumière rouge « danger ». Et je vais soigneusement questionner cette urgence et les conséquences potentielles. « Quelles sont les conséquences si cette tâche n’est pas effectuée immédiatement ? » En général, ça fait dégonfler l’urgence.
👉 Ma règle est : pas d’urgence dans la journée ! Je ne chamboule pas systématiquement mon organisation pour faire entrer la nouvelle tâche dans mon agenda. Je planifie un temps pour la réaliser sur un prochain jour ou une prochaine semaine. En revanche, je dis à quelle date je peux le réaliser, et je tiens ma promesse.
👉 Chaque matin, j’identifie LA chose importante que je veux faire avancer. Et je commence par cela. Parce que je me suis aperçue que si on ne commence pas par ca, la journée avance tel un tapis roulant et on risque de se retrouver sans avoir faire ce qu’on voulait faire à la fin de la journée.
👉 J’essaie de réduire au maximum le nombre de tâches que je veux faire dans une journée. Parce que le sentiment d’urgence vient aussi du nombre de tâches qu’on a envie de faire entrer dans un laps de temps.
👉 J’apprends à remettre au lendemain. Quand 19h arrive, je me dis que je ne terminerai pas, et je finirai demain. Pas facile à faire. J’ai encore besoin de pratique. Mais je m’aperçois que, généralement, l’urgence n’est pas si grande.
Je développe des compétences
👉 Je travaille mon attention en faisant des séances de méditation.
👉 Je travaille mon calme et mon lâcher-prise (notamment sur l’idée de tout terminer dans une journée ou en mettre moins) en suivant des séances de sophrologie comme celle-ci
Je m’organise
👉 J’écris : cela m’aide à mettre de l’ordre dans mes pensées et à identifier les raisons qui me poussent à aimer l’urgence et comment m’en défaire
👉 J’ai désactivé progressivement une grande partie des applications qui étaient sur mon téléphone portable : ca a commencé par les notifications sonores – qui me donnaient un sentiment d’urgence – puis les notifications tout court (vous savez, ces petits ronds rouges qui vous donnent le sentiment d’un truc à faire. J’ai ensuite désactivé Facebook sur lequel je passais beaucoup de temps et récemment Linkedin (en fait, le logiciel m’a déconnecté, et je n’ia pas remis mon mot de passe). Depuis, je passe beaucoup moins de temps sur mon portable, et ca fait beaucoup descendre l’urgence.
👉 J’ai un binôme avec qui challenger la notion d’urgence. Nous nous aidons mutuellement à questionner la notion d’urgence de ce que nous voulons faire et çà nous permet l’une et l’autre de prendre du recul. C’est vraiment utile !
Et vous : quelle est votre relation à l’urgence ? Comment faites-vous pour vous désintoxiquer ?


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