Non, le titre n’est pas de moi.🤪 Mais je le trouve assez drôle…😁
C’est le titre d’un livre hyper intéressant, écrit par Natalie Levisalles, diplômée en psychologie, et journaliste à Libération.
Contrairement à la grande majorité des livres qui traitent de l’adolescence, ce livre n’explique pas comment gérer les relations avec les ados.
Non, il s’intéresse plutôt à la période de l’adolescence en tant que telle : est-ce que d’autres animaux connaissent cette période aussi ? « Sert-elle à quelque chose ou bien est-ce juste un cadeau empoisonné que l’Évolution a fait à l’homme ?«
En cherchant une réponse à cette question, Natalie Levisalles revisite l’ensemble des bouleversements que traversent nos ados et qui expliquent leurs comportements.
C’est absolument passionnant et surtout vraiment édifiant : il y a certaines choses contre lesquelles il est impossible de lutter. Parce que c’est juste des faits biologiques. Il faut apprendre à faire « avec ».
Je vous fais un petit résumé de ce que j’ai appris (cela vous donnera peut-être envie de le lire à votre tour ?😉)
1. L’adolescence est de plus en plus longue
- L’adolescence existerait depuis la nuit des temps et il semblerait que d’autres animaux la connaissent aussi
- Le grand changement, c’est qu’elle dure beaucoup plus longtemps : il y a un siècle, la période de l’adolescence humaine durait entre 2 et 4 ans. Elle dure maintenant 8 à 15 ans. A cause principalement de 2 raisons : une puberté plus précoce et une maturité sociale plus tardive.
- C’est la cause de pas mal de problèmes : plus la puberté est précoce, plus la croissance est rapide (ce qui est à la fois fatigant pour celui qui subit cette croissance ET source de stress de voir son corps se modifier aussi vite).
2. Les ados sont « jet laggués »
Les ados se couchent plus tard et se lèvent plus tard.
Cela s’explique par des raisons biologiques :
- ils connaissent un retard d’une à deux heures dans la sécrétion de mélatonine (qui déclenche le sommeil). Ce qui fait qu’ils n’ont pas sommeil avant minuit voire 1 heure du matin.
- la « pression » du sommeil est moins forte chez eux. Ce qui fait qu’ils peuvent plus facilement « lutter » contre cette envie de sommeil, surtout s’ils sont en train de jouer à un jeu vidéo passionnant
- ils ont besoin de plus de sommeil qu’un enfant
Résultat : ils sont systématiquement en manque de sommeil, surtout si on les oblige à se lever à 7h pour aller à l’école. A peine 1 ado sur 5 aurait son compte de sommeil. « Plus grave encore, il leur manque la dernière partie du sommeil, celle qui est la plus riche en sommeil paradoxal(…), dont on dit (…) qu’il est le plus important pour la mémorisation et l’apprentissage.«
On constate apparemment ce même « Jet lag » chez singes.
« Au fur et à mesure que le temps passe, c’est comme si l’adolescent s’éloignait de sa famille, comme s’il traversait plusieurs fuseaux horaires en partant vers l’ouest. Et, comme on le sait, le corps s’ajuste plus facilement à un décalage horaire vers l’ouest que vers l’est. Si on laisse trop filer, il est difficile ensuite de revenir en arrière. »
Que faire de ca ?
- éviter d’aggraver la dérive en gardant des horaires pas trop décalés le week end, en évitant les excitants (comme le coca ou les jeux videos) en fin d’après-midi.
- l’aider à se réveiller le matin en l’exposant à la lumière vive.
3. La position avachie est la meilleure pour leur corps
L’ado passe beaucoup de temps en position couchée.
« Vous vous affligez de voir un jeune être théoriquement plein de sève et d’énergie dans cet état pathétique ? (…)
Réjouissez-vous (…), en s’affalant de cette manière, il fait exactement ce qui est bon pour lui et pour son corps. Il a trouvé tout seule ce que les ergonomes, les designers de meubles, les compagnies aériennes et la NASA ont mis des années à calculer : la position à 127°.«
C’est la position la plus proche de la « gravité zéro ». C’est la position calculée pour les sièges d’astronautes (angle entre le dossier et l’assise), elle est également utilisée pour les micro-chirurgiens qui peuvent ainsi rester assis longtemps sans fatigue musculaire.
Avec les fesses sur le canapé, les pieds sur la table basse et les coussins pour soutenir la tête, l’ado est dans la position idéale. En effet, le pic de croissance des os entraine chez eux des douleurs dans les ligaments et les muscles.
4. La croissance n’est pas « harmonieuse », les rend gauche et les effraie
Contrairement à ce que je pensais, ils ne grandissent pas de partout en même temps. Non. Cela se fait membre par membre…
Mais cela suit quand même un ordre précis :
- d’abord les pieds et les mains
- puis les jambes et les avant-bras
- puis les cuisses et les bras
- et, en dernier, le tronc.
Et comme, en plus, cela peut se faire de manière asymétrique entre les membres, ca fait un peu effet « monstre »😳…
Ils grandissent si vite (10 cm par an pour les garçons, 8 cm par an pour les filles), le centre de gravité se déplace si rapidement, que le cerveau a du mal à suivre : avec tout ca, on comprend qu’ils aient du mal à coordonner tous leurs mouvements (d’où l’impression qu’ils sont parfaitement gauches….).
Et, pour couronner le tout, la poussée de croissance est suivie par l’apparition de caractères sexuels secondaires.
« Face à un jeune humain en période de puberté, on a parfois l’impression d’être devant une expérience de petit chimiste ou un dessin animé en accéléré. Des choses poussent, explosent ou jaillissent dans tous les coins. » Seins, poils, acné, odeurs… « Pour le propriétaire du corps, c’est gênant, étrange, parfois angoissant.«
5. Le cerveau est en chantier total
On nait avec un stock de neurones. On n’en créera pas durant notre vie. Ce qu’on va faire, c’est créer des connexions entre les neurones.
Il y a quelques années, les scientifiques pensaient que cerveau était quasi terminé avant l’adolescence :
- les 2 premières années de la vie d’un humain, le cerveau était en chantier total,
- puis le cerveau restait encore plastique quelques années.
D’ailleurs, le cerveau atteint 95% de sa taille adulte à 7 ans, et 100% à 11,5 ans pour les filles et 14,5 ans pour les garçons.
Les chercheurs ont eu la surprise de découvrir que le chantier reprenait à l’adolescence.
Mais différemment.
- Il y a d’abord une prolifération de connexions entre les neurones (le maximum de connexions est repéré à 11 ans pour les filles, 12,5 ans pour les garçons).
- Ensuite, un élagage des neurones se fait (on perd 0,7% de nos neurones par an jusque 25 ou 30 ans.) Cela se fait sous le principe : ce qui est régulièrement utilisé est gardé. Le reste est supprimé pour rendre les réseaux plus efficaces et plus rapides (d’où l’importance d’être attentif à ce qu’on utilise régulièrement….)
- Et, en parallèle, une gaine blanche se forme sur les connexions. On appelle cette gaine la « myéline« . Elle permet d’accélérer les connexions entre les neurones (jusqu’à 100 fois plus vite). Ce processus continue jusqu’aux 50 ans.
Le truc, c’est que ce processus d’élagage (un peu comme on désherbe les mauvaises herbes), ne se fait pas dans tout le cerveau en même temps.
- d’abord les aires motrices et sensorielles
- puis celles impliquées dans l’orientation spatiale, la parole et l’attention
- et enfin… le lobe frontal qui gère l’anticipation, la coordination, l’empathie, l’organisation, le contrôle des émotions… C’est avec cette partie du cerveau qu’on peur comprendre des plaisanteries, tenir compte des réactions des autres, prendre en compte des infos ambiguës, filtrer les informations sans importance, garder en tête un plan à exécuter plus tard…
« En clair, cela veut dire que la petite faiblesse du côté de la région qui organise er anticipe a pour conséquence directe qu’une fille de 14 ans est persuadée de pouvoir faire ses devoirs, sortir avec ses copains et ranger sa chambre dans la même soirée. De même qu’est encore en travaux le système qui fait tourner sa langue 7 fois dans sa bouche avant de hurler sur sa mère. Le savoir rend tout de suite l’affaire moins personnelle. »
« On comprend aussi qu’un adolescent ait du mal à coordonner et à anticiper : préparer un examen déterminant, le bac par exemple, plus de 2 jours à l’avance (…) Il est 19 heures, par quoi commencer ? Appeler une copine ? Réparer son skate ? Commencer la dissert qu’on doit rendre demain à 8 heures ? Ou se remettre à World of Warcraft et faire passer son personnage du niveau 35 au niveau 36 ? Si ca ressemble à quelque chose que vous avez sous les yeux, prenez votre mal en patience, les fonctions dites « executives » n’arrivent à maturité qu’entre 20 et 25 ans. Et encore, pas chez tout le monde. »
Le décalage entre les garçons et les filles ne se rattrape qu’à… 30 ans !!
6. Les amours adolescentes font partie du programme biologique
« Non seulement le coup de foudre existe, mais il est programmé dans nos cerveaux ».
Pourquoi programmé ? Parce que grand but de la vie, c’est la reproduction, pardi !
Pour que l’amour puisse naître, il faut que le cerveau ait été préparé : à la puberté, des tonnes d’hormones sont déversées qui modifient les comportements et les émotions. Et comme nous l’avons vu, la partie du cerveau qui régule les émotions n’est pas encore prête, les émotions déferlent régulièrement.
Une des particularités de cette période est la facilité avec laquelle on tombe amoureux parce que le système de régulation, dans le cerveau, n’est pas encore prêt… A tel point que le premier amour est l’une des plus fortes experiences de la vie !
Petit conseil
Une hormone, en particulier, l’ocytocine, est sécrété chez les filles. C’est l’hormone de l’attachement. Il a été démontré en laboratoire que si on appliquait un spray nasal d’ocytocine à des personnes dont on trahissait la confiance, ils maintenaient leur confiance malgré la trahison… Or « il ne faut pas plus de 20 secondes au cerveau d »une femme pour se mettre à produire de l’ocytocine après qu’un homme l’a prise dans ses bras. (…) Ne laissez pas un homme vous prendre dans ses bras à moins que vous n’ayez l’intention de lui faire confiance. (…) Et si c’est le cas, assurez-vous que l’étreinte dure au moins 20 secondes. »
7. tout est ennuyeux sauf l’extrême
Le cerveau de « la raison » n’est pas encore prêt.
En revanche, le cerveau des émotions et du plaisir oui.
Conclusion, toute action « normale » est ressentie comme ennuyeuse.
Pour ressentir de la motivation et du plaisir, les ados recherchent les risques.
Le goût du risque aurait d’ailleurs été sélectionné par l’Évolution pour encourager l’exploration, la volonté de quitter le cocon familial, de faire son chemin er trouver son partenaire.
D’ailleurs l’Histoire est pleine de ces ados qui ont agi au péril de leur vie :
- Alexandre a 18 ans quand il est général victorieux et 20 ans quand il devient roi des Perses,
- Jeanne d’Arc a 16 ans quand elle part bouter l’Anglois hors de France,
- Marco Polo 17 ans quand il quitte Venise pour la Chine,
- Christophe Colomb 14 ans quand il embarque pour son premier voyage…
8. Découverte des autres
L’empathie semble présente, à l’état d’ébauche, ce n’est qu’au début de l’âge adulte qu’elle arrivera à maturité.
Il est d’ailleurs très intéressant de constater que « les jeunes de moins de 14 ans font beaucoup d’erreurs quand ils doivent reconnaître un sentiment sur la photo d’un visage. Cela pourrait expliquer (…) pourquoi les adolescents se trompent si souvent sur la nature des signaux émotionnels, voyant de la colère ou de l’hostilité – « Le prof me déteste ! » – là où il n’y en a pas. » Ils peuvent également « être aveugles aux marques d’hostilité ou d’agacement qui sautent aux yeux des adultes ou des adolescents plus âgés. »
L’apprentissage va se faire avec les autres jeunes, leur « bande ».
9. Alors, pourquoi l’adolescence ?
Pourquoi cette période de changements aussi forts d’un coup ?
Une théorie serait que le jeune humain, contrairement à de nombreuses espèces, a besoin de beaucoup de temps pour maturer. « Pendant ce temps où il est incapable de se nourrir seul et de se défendre, il vaut mieux qu’il reste petit – et donc ne mange pas trop – et d’aspect juvénile, pour que d’autres aient envie de le protéger plutôt que de l’agresser. (….) la poussée de croissance (…) permet aux humains de rattraper le temps perdu (…) Pour ne pas retarder trop le début de la procréation, il faut hâter la puberté afin de produire le plus de descendants possibles. »
Une deuxième théorie serait que, « avant de se lancer dans la fabrication de leur propre descendance, les jeunes humains commenceraient pas une sorte de stage que nous appelons adolescence. Et comme les filles ont leur pic de croissance avant d’être fertiles et que c’est le contraire pour les garçons, l’apprentissage de ces comportements d’adulte se fait dans des conditions différentes pour les deux sexes. »
En fait, l’adolescence serait un élément central de la réussite de l’espèce humaine.
Waw ! Je suis sûre que vous ne regarderez plus les ados de la même manière 🙂

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